Avis - Le monde selon Final Fantasy de Third Editions
- Publiée le 04.01.2023, à 15:19
- Par Vincent P.
1987, Square sort au Japon un jeu vidéo, un RPG, nommé Final Fantasy. Il s’agit d’un titre chapeauté entre autres par Hironobu Sakaguchi qui va lancer une licence qui touche aujourd’hui un très large public, d’autant que les fans attendent la suite de FFVII Remake ou encore FFXVI, sans parler de ceux qui continuent à sévir sur le MMO FFXIV ou qui viennent de découvrir le remaster+ de Crisis Core. Si vous aimez le genre, il y a fort à parier que vous ayez au moins lancé un jour un opus de la licence, qu’il soit canon ou non. Si vous êtes fan, en plus d’éventuels objets dérivés, vous pouvez vous procurer bien des lectures, dont toute la collection La Légende Final Fantasy [insérez le numéro souhaité] de chez Third Editions. Aujourd’hui, toujours chez Third Editions qui nous a fourni l’exemplaire, nous tenons à vous parler d’un autre ouvrage dédié à la licence, « Le monde selon Final Fantasy. Le RPG japonais comme mythe moderne » de Rémi Lopez, auteur notamment de « La Légende Final Fantasy XII & Ivalice » et de « La Légende Final Fantasy VIII ». Vu que l’éditeur semble avoir déjà fait le tour de la licence avec chaque livre dédié ou presque, nous pouvons légitimement nous demander ce que peut apporter ce nouvel ouvrage… Réponse !
Un cristal pour les réunir (presque) tous
Avant de parler du contenu de l’ouvrage, précisons que Le monde selon Final Fantasy (on va garder la version courte) est un grand format en 220 x 310 mm qui comprend 312 pages. Autant dire qu’il prendra un peu de place dans votre bibliothèque. Cela étant, Sylvain Ferret a signé la magnifique illustration de la couverture cartonnée du livre, du moins dans son édition standard affichée à 39,90€ (la version First Print à 44,90€ mais au stock épuisé est signée Vincezo Riccardi). Pour illustrer le propos du livre qui revient sur tous les FF canons, hors MMO (et donc hors spin-off), sans pour autant trop surcharger la couverture à coups de superpositions comme c’est souvent le cas ces dernières années, il a imaginé une fresque illustrant presque tous les FF. C’est donc avec la représentation d’un cristal morcelé, élément cher à la licence, qu’il illustre dans chaque éclat un des univers de la licence, le tout avec quelques plumes de Chocobo qui viennent rappeler aussi bien la descente que l’ascension selon le sens des plumes, tout en faisant plus aisément écho à l’écriture, la plume étant le symbole de l’écrivain. Elles apportent une forme de mouvement, un maître-mot nécessaire pour comprendre les lignes directrices profondes qui servent de support aux histoires contées. Notons également que Sylvain Ferret a réalisé un (magnifique) frontispice pour chaque entrée de chapitre. En somme, il s’agit d’une illustration reprenant des éléments de l’univers qui va être abordé dans le chapitre. Là encore, on retrouve un point d’ancrage, les fameuses plumes.
Le découpage du livre est très simple, un chapitre aborde un jeu de la licence, ce qui donne donc 13 chapitres pour parler des FF I à X, de FF XII et XIII et de FFXV. FF VII a même le droit à deux parties au sein de son chapitre, ce qui en fait le plus long. La mise en page est aérée, les titres et les éléments colorés introduisant les citations des jeux intégrées permettent d’entrecouper les paragraphes un peu longuets qui permettent d’analyser chaque jeu. Bien sûr, le but de Rémi Lopez n’était pas de synthétiser ce que l’on peut retrouver dans les autres ouvrages pour simplement survoler l’ensemble de la licence et donner envie d’approfondir ses connaissances par la suite. Le but, n’est pas non plus de fournir une quinzaine à une quarantaine de pages sur chaque jeu pour simplement en faire la promotion ou raconter l’histoire dans les grandes lignes pour donner envie d’y jouer. Le but de cet ouvrage, c’est de montrer que chaque Final Fantasy a construit son histoire autour de certaines thématiques, autour de certains symboles qui ont été modernisés mais qui trouvent leurs racines dans divers mythes bien plus anciens. C’est aussi l’occasion de montrer que chaque opus arrive à apporter un point de vue différent, même lorsqu’il aborde un sujet similaire. Des coquilles vides de FF I que nous incarnons au prince arrogant de FFVI, la série a permis de conter bien des histoires, du combat assez classique entre les ténèbres et la lumière au combat plus intimiste entre le conscient et l’inconscient d’un personnage.
Rémi Lopez reparcourt donc chaque opus cité en apportant une analyse des évolutions, se concentrant parfois même sur un seul personnage qui marque à lui seul un jeu, comme Cecil de FFIV, même s’il utilise certains protagonistes pour montrer les répercussions que la rencontre avec le personnage principal a sur son évolution. Il s’appuie énormément sur les travaux du psychiatre Carl Gustav Jung, fondateur de la psychologie analytique, et du mythologue Joseph Campbell, pour analyser les évolutions des histoires en les rapprochant des divers mythes issus aussi bien de l’Orient que de l’Occident et pour mettre en avant la psychologie des personnages. Il va également piocher dans ceux de Erich Neumann (élève de Jung) ou encore de l’historien et mythologue Mircea Eliade. Au-delà des quelques noms identifiables, comme Tiamat (déesse mésopotamienne), Ifrit (sorte de djinn dans la religion islamique) ou encore Shiva (dieu hindou), invocations bien connues des fans de la licence, il vient surtout montrer que les récits, aussi modernes pouvaient-ils être à leur époque en évoquant certains sujets, puisent dans des ficelles plus anciennes.
Pourquoi ? Simplement parce qu’il y a des concepts qui existent de tout temps, que la nature humaine ne semble pas tant avoir évolué depuis des siècles, que les drames, la mort, la religion, les croyances, la lumière, les ténèbres, les énergies, etc. ont toujours leur place dans notre quotidien. Cela lui permet ainsi de montrer via FFIII par exemple que le conflit entre la lumière et les ténèbres est loin d’être aussi manichéen qu’imaginé, que la clé est l’équilibre qui règne entre les deux, comme le symbole du Yin et du Yang (l’un ayant un peu de l’autre en son sein et les deux s’épousant pour ne former qu’un cercle, symbole de l’infini et du renouvellement)… De montrer également que Cecil est clairement un personnage marquant de la licence, avant que Terra et Cloud ne l’éclipsent dans le cœur de certains fans ou encore de mettre en avant le fait que l’on peut parler de la mort de bien des façons, comme en témoignent les récits de FFVI, VII, IX et X par exemple. Il remet en relief ces symboles qui ponctuent notre vie actuelle, comme la montage en signe d’ascension, d’élévation de la pensée, de l’esprit, voire de soi, celui de la grotte, comme le ventre de la mère, le concept de la mère ogresse ou celui du Léviathan ou de toute autre créature qui vient entraver la route des héros, sans parler de ces tragédies, qui surviennent souvent au début, comme un village qui brûle, qui marquent le début de l’aventure pour de jeunes héros entre deux âges contraints de quitter le cocon familial pour se confronter brutalement à une vie de responsabilités.
Bref, le propos est étayé, souvent juste et les analyses sont très intéressantes. Même s’il est clair qu’en fan de la licence, nous avions déjà plusieurs des références, l’ouvrage a permis de toutes les mettre en perspective et ainsi de mieux apprécier les évolutions apportées par chaque volet, allant même jusqu’à mieux faire comprendre la relation amoureuse de FFVIII décriée par certains (pas par nous en revanche) et son rôle dans l’évolution de la licence (car oui FFVIII est bien un JRPG et non une comédie romantique, nous sommes en phase avec l’auteur). Le seul bémol, c’est que Rémi Lopez, aussi passionné soit-il, a un style assez lourd. Certains paragraphes frisent l’indigestion, non par parce qu’il faut s’accrocher pour bien comprendre les concepts parfois difficiles à cerner (l’anima, l’animus en tête) mais parce qu’il use et abuse de périphrases, insistant parfois sur des explications alors que la première phrase suffisait. C’est un peu dommage parce qu’on ressent bien la maîtrise du sujet et que les analyses apportent un vrai plus à la lecture des histoires des jeux. Elles ouvrent certains points de vue et amènent des réflexions que l’on n’a pas forcément eues en y jouant, surtout pour les opus plus anciens que l’on a découvert lorsqu’on était gosse.
L’avis perso de Vincent / onizukadante // Mettre en lumière les parts d'ombres
Avoir un jeu Final Fantasy, un produit dérivé, un film ou un livre sur l'univers, cela fait toujours un petit quelque chose à votre serviteur qui a grandi avec cette licence. Avec « Le monde selon Final Fantasy. Le RPG japonais comme mythe moderne », Rémi Lopez signe un excellent livre analytique qui revient sur tous les opus canons, sauf le XI et le XIV, mettant en avant les trames abordées et les rapprochant de toutes les ficelles connues soit du côté de la mythologie, soit du côté de l'Histoire, soit du côté de la psychologie. Bien entendu, pour cela, il s'appuie sur plusieurs travaux, dont ceux de Carl Gustav Jung et Joseph Campbell en tête. L'ouvrage est un grand format qui bénéficie en prime d'une magnifique couverture signée Sylvain Ferret, l'artiste qui a également réalisé les superbes frontispices qui illustrent chaque début de chapitre. Grâce à une belle mise en perspective de ce qu'est le RPG japonais et la mise en corrélation avec les mythes et symboles issus de diverses cultures d'Orient et d'Occident, l'auteur livre un point de vue rafraîchissant sur l'histoire de la licence ou plutôt sur les histoires de la licence. Le seul bémol, c'est que si bien des paragraphes sont agréables à lire, ce qui est également rendu possible grâce à une mise en page aérée, plusieurs autres frisent l'indigestion tant la plume de l'auteur peut être lourde dans certaines circonstances. Ce ne sont pas les propos, qui demandent un peu de réflexion et une bonne assimilation de certains principes psychologiques qui en sont responsables, mais bien un style d'écriture qui use et abuse parfois d'exemples et périphrases pour expliquer une même chose. C'est la seule ombre au tableau mais disons qu'elle ne va pas sans la lumière apportée par le reste (vous comprendrez en lisant). |
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Avis - Le monde selon Final Fantasy de Third Editions
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