C’est la guerre ! Ce n’est pas moi qui le dis, ni John Rambo, ce sont les services de streaming. Entre Netflix, Prime Video, Disney+ et HBO Max, c’est la bagarre. Hein quoi ? J’ai oublié Salto ? Ah, ah, arrêtez vos conneries, ce n’est pas le moment de blaguer. Chaque service tente de séduire les plus grands réalisateurs, quand ça ne rachète pas carrément un studio entier comme Amazon l’a fait récemment avec MGM. En bisbille avec la Warner suite à ce qui s’est passé sur les films DC (notamment Batman v Superman et surtout Justice League dont une excellente critique est dispo ici), maltraité par un studio qui ne veut visiblement plus de lui, Zack Snyder a donc fini par céder aux avances de Netflix. Au menu ? Tout un tas de projets. Rebel Moon, un film de science-fiction, un animé sur la mythologie nordique et surtout, l’Army Universe. Et là, vous vous demandez « Mais qu’est-ce que c’est ? ». C’est un univers au sein duquel vont cohabiter plusieurs projets, tous en lien avec le film qui a tout lancé : Army of the Dead. Le dernier film en date de Snyder est donc important à plus d’un titre. Déjà parce qu’il doit tester la popularité du réalisateur sur Netflix mais aussi parce que s'il fait un flop, le projet d’Army Universe tombera à l’eau. Inutile de faire durer le suspens plus longtemps. Army of the Dead a été un succès. Mieux, ça a été un des plus gros succès historiques de Netflix et Snyder vient juste de signer un contrat liant sa boite de prod’ avec la célèbre plateforme de streaming pour ses prochains projets. Mais au milieu des chiffres, des news, etc., on a assez peu parlé de la qualité du film lui-même. 17 ans après Dawn of the Dead, son premier gros film, Zack Snyder revient donc au genre zombies. Retour gagnant ?


Des militaires qui transportent un convoi tellement sécurisé qu’ils ne savent même pas de quoi il s’agit exactement. Un accident sur la route. Voilà comment le contenu mystérieux se retrouve lâché dans la nature. Léger souci, le contenu en question est une sorte de zombie qui, aussitôt libre, se met à trucider les militaires censé l’escorter on ne sait où. Autre petit problème, après une légère errance, ce dernier arrive à Las Vegas. La suite ? La cité du vice se transforme en paradis pour zombies et se retrouve isolée du reste du monde. Un beau jour, afin de régler tout ça, le président des USA décide que la ville va être atomisée à coups de frappes nucléaires. C’est pile à ce moment là que Scott Ward, ancien mercenaire retiré des affaires, est contacté par un énigmatique milliardaire pour une mission à haut risque : monter une équipe, pénétrer dans la ville et aller jusqu’à un casino pour y récupérer les 200 millions de dollars qui dorment gentiment dans un coffre, le tout avant que Las Vegas soit purement et simplement rayée de la carte. Qu’est-ce qui pourrait mal tourner ?

Alors que tout le monde s’attendait à un simple film de zombies, Zack Snyder nous a proposé la complète du chef, salade/tomate/oignons comme on dit. Army of the Dead (AOTD) est à la fois un film de zombies mais également un film de braquage ainsi qu’un film de bande. A y regarder de plus près, et quand on connaît le passif du réalisateur par rapport aux adaptations de comics, on pourrait presque penser qu’il a tenté de nous faire un peu sa version de Suicide Squad. En gros nous allons suivre les mésaventures d’une équipe composée d’un casting haut en couleurs. Du père de famille, juste là pour essayer de toucher le pactole, en passant par l’influenceur star connu pour ses vidéos de tueries de zombies stylisées ou encore par le salopard de base mis en place par le commanditaire de la mission, chaque personnage apporte sa petite touche. Il y a des gens violents, d’autres plus drôles, d’autres sérieux, des badass, des blasés, des héros et des salopards, bref un bel échantillon de ce que peut fournir l’espèce humaine. Pas tout le temps fonctionnelle dans le film, l’équipe de braqueurs l’est en tout cas pour le spectateur. Certaines affinités improbables donnent même lieu à des duos inattendus et on s’attache assez vite à certains membres tout comme on en déteste d’autres quasi instantanément.

Si tout ce petit monde se mélange bien, c’est également le cas des différents genres du film. Le mix film de zombies dans lequel des hordes de morts-vivants doivent être évitées ou trucidées se marie très bien avec le côté braquage demandant de s’introduire dans un bâtiment, forcer un coffre, etc. Comparé aux films de zombies habituels, ça apporte un vent de fraîcheur non négligeable. D’ailleurs les morts-vivants version AOTD ne se comportent pas comme ceux que l’on peut voir habituellement la plupart du temps dans les séries ou les jeux. Ici, ils ont une forme d’intelligence, de cohésion, il y a même une hiérarchie avec un roi et une reine. De plus, ils sont extrêmement vifs, ce qui leur donne vraiment un côté ultra dangereux contrairement aux zombies un peu lents d’un The Walking Dead. Autre aspect qui amène un peu de fraîcheur : le lieu. Le fait que l’action se déroule dans un Las Vegas zombifié et en ruines apporte vraiment un cachet particulier comparé aux paysages de désolations habituels. Aidé par une bande-son signée Junkie XL, AOTD arrive à proposer une ambiance vraiment à part.

On le sait, Snyder aime faire des films longs. C’est encore le cas ici avec 2h20 au compteur. 2H20 qui passent assez vite grâce un rythme soutenu, quelques retournements de situation et un côté « mais qui va survivre ? ». Sans spoiler, les morts sont assez nombreuses et on comprend vite que personne n’est vraiment à l’abri surtout face à des zombies aussi dangereux. Ce qui ne fait que renforcer le petit côté escouade en mission suicide. Snyder aime aussi cacher quelques petites choses ça et là, parfois un détail visuel, parfois une petite phrase, ce qui fait qu’au final, les plus attentifs arriveront à dégager pas mal de théories. Que ce soit sur l’origine des zombies ou même sur d’éventuelles timelines alternatives. Un peu comme il l’avait fait avec le très incompris et sous-estimé Sucker Punch, Snyder cache dans un film tourné vers l’action quelques subtilités que l’on n’attendait pas vraiment (même si c’est beaucoup moins fin dans AOTD que dans Sucker Punch).


Sur le papier, AOTD a tout pour être séduisant. Un réal’ qui a une patte artistique forte, un casting cool, une histoire alléchante mélangeant casse et zombies. A l’arrivée, si le résultat est distrayant, il n’en est pas pour autant parfait. Déjà, on sent la différence de production entre un gros studio comme la Warner et Netflix. Snyder n’a pas tourné comme d’habitude, pas avec les mêmes méthodes, ni le même matos qu’un gros film de super héros ou gros blockbuster. Le premier constat, c’est que AOTD est sans doute l’un des films les moins “Snyderiens” de l’ami Zack dans sa réalisation. On reste à un bon niveau, certaines scènes ont du panache (notamment l’intro) mais nous sommes quand même très, très loin d’un Man of Steel. Évidemment on imagine bien que la pandémie de COVID n’a pas arrangé les choses. Autre point à prendre en compte, alors que le film était déjà tourné, un acteur (Chris D’Elia) a tout simplement été viré du montage final car rattrapé par des histoires de harcèlement sexuel. Pour le remplacer, c’est l’actrice/humoriste Tig Notaro qui a été choisie. Forcément on imagine que ça a été compliqué et coûteux à faire et pourtant le résultat est vraiment satisfaisant. Si on ne le sait pas avant de voir le film, on ne le remarque pas forcément. Rappelons que l’actrice a donc tourné toutes ses scènes seule, à part et a été rajoutée au montage via des effets spéciaux. Et son personnage s’intègre tellement bien à l’équipe que l’on aurait aimé que Tig Notaro soit castée dès le départ car du coup elle se retrouve trop souvent à part et éloignée de l’action principale.

Finalement, il en résulte un film au montage qui a parfois quelques errances même si plutôt efficace mais sans génie, éloigné des standards habituels de Snyder. Certaines scènes font tâche car elles ont un arrière-plan très flou ou un rendu moins naturel que le reste. Rappelons quand même que s'il a bénéficié d’un budget confortable pour AOTD, Snyder n’a pas eu le droit non plus à la montagne de fric habituellement lâchée pour n’importe quel gros blockbuster hollywoodien. Sans être mauvais, AOTD déçoit en termes de réalisation car Snyder nous a habitués à mieux. Un effet accentué par la sortie quelques mois avant du titanesque et incroyable Zack Snyder’s Justice League à côté duquel la comparaison fait forcément mal.

On a aimé			On n’a pas aimé
Un casting réussi Une équipe qui fonctionne Un film qui mélange les genres… Et apporte un peu fraîcheur au genre Une ambiance vraiment à part			Pas le meilleur film de Snyder en termes de réal’ Parfois un peu “brouillon” et pas totalement maîtrisé Un montage efficace mais pas exempt de défauts (ne pas oublier qu’un acteur a été remplacé)

On peut faire un parallèle entre Snyder et son film si on remplace le commanditaire milliardaire par Netflix, Scott Ward par Snyder et la mission de braquer les millions d’un casino par des millions d’abonnés. Alors est-ce que Zack et sa team ont réussi leur mission ? Si on regarde les chiffres, oui, 1000 fois oui. Army of the Dead a été un succès massif. Une série d’animation est en cours de production et un film spin-off (Army of Thieves, basé sur l’histoire de Dieter, le membre de l’équipe chargé d’ouvrir le coffre du casino) va bientôt sortir. Army of the Dead 2 vient d’être officialisé par Netflix, toujours avec Snyder derrière la caméra. Et comme annoncé en intro, l’idylle entre le réalisateur et le service de streaming semble au beau fixe quand on voit tous les autres projets que couvent les deux parties. Mais si on en revient au film, ce dernier, bien que réussi et distrayant, se veut quand même un poil décevant pour du Snyder. Le casting est attachant, les zombies sont réussis, l’ambiance aussi, le scénario se suit bien et il y a même de quoi faire du theorycrafting. Cependant il manque un peu ce côté iconique et puissant, cette claque visuelle et ce style incomparable auxquels Snyder nous avait habitués pendant qu’il faisait ses adaptations de comics DC chez la Warner. Inutile de bouder son plaisir pour autant, tourné en pleine pandémie et avec un acteur à remplacer (et donc un montage à retoucher lourdement), Army of the Dead reste un divertissement efficace qui a le mérite d’apporter un peu de fraîcheur dans le domaine des films de zombies.

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