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La pensée d'Oni #4 - La note

- Publiée le 18.12.2018, à 15:32
- Par Vincent P.
La pensée d'Oni #4 - La note

La note… De 0 à 21/20, tu hantes mes pensées… Tu me fais m’arracher les cheveux quand je dois t’appliquer ou que je dois trancher pour un autre… Tu me fais bondir de ma chaise et parfois même sortir quelques vulgarités quand je te vois chez d’autres… Tu me rassures quand je te regarde et que tu sembles en conformité avec mon avis… Mais tu es cruelle, arbitraire, parfois aberrante, bref, tu me sors par les yeux et je vais finir le travail que j’ai commencé : fini le placard doré, tu vas tomber dans l’oubli, voici la promesse pour la nouvelle année !

La note, une synthèse réduite à sa plus simple expression…

Souvent bien mise en valeur, la note reste pour certains le résumé ultime d’une critique, se servant uniquement de celle-ci pour définir la qualité d’un jeu. « Il a eu 14, c’est le plus mauvais épisode de la série », « 20, c’est le jeu de l’année », « de toute façon, en dessous de 16, je n’achète pas », « 13, t’es malade ? Le jeu vaut 14 ! », voilà un petit exemple des phrases que j’ai pu lire ou entendre depuis plusieurs années. Quand je cherche à discuter avec les gens de la note justement, ils restent souvent bloqués sur la note, allant parfois même à comparer la note d’un jeu d’action avec celle d’un FPS ou d’un Metroidvania. Pire, je vois parfois certains dire, comment ce jeu a pu avoir 17 (sur un jeu qui a dix à vingt ans), alors que celui-ci qui est mieux a 16… Bref, je vais m’arrêter là parce que les exemples sont tellement nombreux que je pourrais encore noircir bien des pages.

La note, c’est quoi alors ?

Pour moi, la note, c’est une notification arbitraire qui indique une tendance. Il y a deux grandes façons de l’attribuer : soit en pondérant les « pour » et les « contre » de la critique, soit en essayant de refléter le feeling général du testeur. Déjà, d’une méthode à l’autre, on peut avoir de grosses différences. Qu’on l’applique sur 5, 10, 20, 100 ou à base de « mauvais, bof, moyen, bon, excellent », il y a toujours la possibilité de multiplier, diviser ou extrapoler pour terminer par l’avoir sur un même référentiel. Du coup, qu’on parte sur une numérotation, des étoiles, des pouces en l’air ou en bas, des qualificatifs ou autres, on reste dans un sens dans un système de notation.

La note, pour les actionnaires et le concours de qui a la plus grosse…




Totalement archaïque, la note est restée longtemps ancrée dans les systèmes. Ce n’est que depuis quelques années que certains sites s’en sont défaits, pour éviter par exemple les pugilats dans les commentaires, à coups de « note de merde », « putains de vendus » et autres joyeusetés. Il faut avouer qu’elle est et reste encore incontournable sur beaucoup de sites et auprès de plusieurs éditeurs. Pour deux grosses raisons… La première, c’est qu’elle donne de la visibilité à un site. Clairement, quand on est dans les premiers à sortir une note, elle est souvent relayée, voire indexée sur Metacritic et autres collecteurs. En plus, elle génère souvent des réactions, ce qui assure du clic, des visiteurs et des pages vues, ce qui n’est pas négligeable pour gonfler les stats. Elle est bête et méchante et super facile à partager pour le jeu des comparaisons. La deuxième, c’est parce que certains studios/éditeurs ont des objectifs à atteindre (XX% sur Metacritic par exemple), souvent liés aux actionnaires qui font pression pour se remplir les poches.

La note, source de corruption ?




Comme pour beaucoup (éditeurs comme lecteurs) la note a une certaine importance, elle a souvent (je parle au passé mais j’imagine que ça s’applique encore au présent) été un point de discorde et un point de pression. Je ne compte plus les cas de corruption qui ont été liés à la note, certains éditeurs ayant assuré à des rédactions que si une certaine note n’était pas atteinte, alors la publicité pourrait bien migrer vers un autre site plus conciliant. Cela dit, à l’heure où la publicité ne rapporte plus grand-chose, ce phénomène doit s’atténuer. Pour donner quelques exemples, j’ai pu voir sur un site que je ne citerai pas un test de Turok publié avec un 8/20 qui, après un petit retrait, est revenu à peine retravaillé avec un 12/20. Incroyable, 24H de réflexion, des défauts en pagaille et une note augmentée de 50%…

Dans le cadre de la promotion de Dante's Inferno, Electronic Arts avait fait encore plus fort : le kit de presse envoyé à certaines rédactions contenait un chèque que le journaliste testeur pouvait encaisser. En contrepartie, il gageait de mettre au moins 15 au jeu (si ma mémoire ne me fait pas défaut). Même si le titre est bon, il en va de soi que les soupçons sont vite soulevés pour tous les sites ayant attribué un 15 ou plus, avant même que qui que ce soit puisse s’intéresser à l’avis même du testeur. J’ai vu d’autres choses également, comme des tests de PES 2008 (oui, il était mauvais) qui ont été publiés avec des 17 ou des 18 qui ont été rabaissés quelques jours/semaines après de quelques points suite à tous les retours des joueurs. Là encore, les cas sont nombreux, très nombreux et je ne parle même pas de toutes les sessions tests auxquelles j’ai participé et durant lesquelles certains confrères jouaient 2 à 4 heures à un jeu et livraient le test complet peu après quand l’embargo était levé, quand moi j’écrivais une preview en attendant la version finale. Et je ne parle pas non plus des 21/20 totalement abracadabrantesques ou de ceux qui appliquent la note maximale à un jeu qu’ils ont testé après l’avoir présenté eux-mêmes sur un salon en étant payés pour…

La note, quand elle prend le pas sur l’avis…




Autre point qui peut faire disjoncter, comme j’ai pu l’évoquer dans les lignes précédentes, bien des lecteurs ne jugent la qualité d’un test qu’à la note attribuée. Cette simple note, vulgaire, aguicheuse, arbitraire, est la source d’une qualification d’un travail qui a pris plusieurs heures (pas chez tous les testeurs, je vous l’accorde, mais certains préfèrent refaire deux fois le premier disque de Lost Odyssey plutôt que d’aller au bout du jeu), entre le jeu et l’écriture de la critique. Elle en vient parfois à occulter l’avis même du testeur, jusqu’à en arriver à cette improbable situation dans laquelle le lecteur dit au testeur : « je suis d’accord avec toi sur tout, mais putain, ton 13 est trop sévère/généreux (rayez la mention inutile ». Bref, elle peut entacher toute la réflexion du testeur qui est à mes yeux plus approfondie et surtout révélatrice du pourquoi il a choisi cette note et pas une autre.

La note, quand elle ne correspond plus à l’évolution du marché…




Il y a encore pire, même si elle était bancale, avec ses défauts et tout ce qu’on peut lui reprocher, la note arrivait à faire sens avant l’avènement d’Internet sur nos consoles. Depuis qu’elles sont connectées, les jeux ne cessent d’évoluer. Des mises à jour, des contenus, des politiques commerciales plus ou moins abusives, des rétropédalages (coucou les microtransactions de Star Wars Battlefront II, et toutes les autres), voilà tout un ensemble qui peut transformer complètement un jeu. Je vais prendre quelques exemples relativement récents… Le premier c’est Destiny. A sa sortie, c’était une coquille vide qui ne valait clairement pas le prix fort. Trois extensions plus tard et quelques mises à jour, il arrive dans une version GOTY qui montrait enfin tout le potentiel du titre et en faisait un jeu agréable.

De même, Sea of Thieves est arrivé avec un manque flagrant de contenu et de fonctionnalités mais il continue à s’enrichir encore et encore. Rainbow Six Siege est sorti avec de sacrés qualités, plutôt complet, mais les développeurs continuent encore à l’enrichir gratuitement, depuis la sortie, le peaufinant de plus en plus. Quant à Battlefield V, il arrive en « game as service », vendu au prix fort et dépouillé d’une partie du contenu habituel, mais les développeurs promettent un suivi gratuit pour le compléter (comme une sorte d’accès anticipé qu’on paie au prix fort, comme si le Season Pass était compris dedans en fait), ce qui fait que le jeu dans un an sera clairement différent d’aujourd’hui. Du coup, une note fixée dans le marbre lors de la sortie ou peu après est-elle pertinente ? De même lorsqu’il y a une MaJ Day One, faut-il noter le jeu sans l’application du patch ou en le prenant en compte ? Avec les pratiques et les suivis actuels, la note perd encore plus en pertinence à mes yeux.

Les derniers mots d’Oni : il est temps de s’en débarrasser !
J’ai eu beau mettre en place des systèmes pour contrôler un minimum les notations (je tranche la note des tests des autres testeurs qui fournissent une fourchette à un ou deux points près ; nous relisons à plusieurs pour affiner la notation ; parfois nous sommes plusieurs à tester un jeu pour affiner la note et l’avis, etc.), j’ai fini par supprimer la note directement sur la page de la critique. A mon sens, cela a permis à tout le monde de se consacrer au moins aux « +/- » et à la conclusion. Mais elle est restée sur certains coins du site et peut donc facilement être retrouvée. Pour 2019, je tiens à la supprimer complètement du site (un système de notation évolutif restera en base de données pour de simples statistiques réalisées en interne), pour tous les points exposés plus haut. La note a fait son temps, sa pertinence est tombée au plus bas et elle ne reflète pas la passion avec laquelle nous écrivons une critique. Elle est arbitraire et ne vaut qu’à un instant T, dans un contexte. De même, comment ne pas être plus indulgent avec un bon petit jeu qui est offert en Xbox Live Gold ou qui peut être accessible sans frais supplémentaires via l’abonnement EA Access ou Xbox Game Pass ? Stop ! Laissons-lui la fin de l’année et débarrassons-nous-en enfin. Qu’elle repose en paix…

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