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[MXG+] XG Film Club - Joker

- Publiée le 13.10.2019, à 21:43
- Par Vincent P.
[MXG+] XG Film Club - Joker

Certains personnages marquent le cinéma, les comics, les séries, etc. à tout jamais. Ils entrent dans la pop culture et sont connus par des générations entières (on pourrait citer Dark Vador comme exemple le plus célèbre). Avec la mode des super héros au cinéma, nous avons eu droit à beaucoup de personnages mais au final assez peu de ces derniers sont restés vraiment marquants au delà de leur aspect "héros". Quant aux super vilains, ils sont dans 90% des cas une sévère déception... sauf peut-être un seul. Un personnage dont chaque incarnation marque les esprits et se retrouve inlassablement comparée aux précédentes, un personnage qui a la réputation d'éprouver les acteurs, de les changer. Je parle ici du Joker. Némésis ultime de Batman et sans aucun doute possible le meilleur super vilain jamais créé, il a eu droit à des dizaines de versions différentes y compris à l'écran. Que ce soit le clown extravagant du Batman de Burton, le fou hors de contrôle et mystérieux du The Dark Knight de Nolan ou encore le gangsta totalement dingue du Suicide Squad de Ayer, chaque version a fait énormément parler d’elle. Quelle est la meilleure ? La plus proche des comics ? La plus originale ? Les débats font rage et souvent c'est la prestation du regretté Heath Ledger qui est considérée comme la plus puissante... jusqu'à aujourd'hui ? Joaquin Phoenix débarque dans le cercle très fermé des acteurs ayant campés le super vilain le plus célèbre du monde. Auréolé par un Lion d'Or à la Mostra de Venise et par autant de critiques élogieuses que de polémiques, il ne faisait aucun doute que le Joker de Todd Phillips ferait parler. Mais une fois la hype mise de côté, que reste-t-il du film ? Et surtout, que vaut la prestation de Phoenix ? Il est temps de sortir son plus beau sourire et de tenter de parler de tout ça.

Is it just me... or is it getting crazier out there?



Arthur Fleck est un homme malade. Touché par une affliction qui déclenche parfois chez lui des rires totalement incontrôlés, sous grosse médication, il tente de suivre son propre chemin tant bien que mal. Clown... qu'il s'agisse de tenir un panneau publicitaire ou de faire rire des enfants, le travail d'Arthur semble peu gratifiant même s’il y met tout son cœur. Arthur rêve de faire rire les gens, il voudrait être un comédien et passer dans le fameux Murray Show mais doit se contenter de son travail de clown mal payé. D'agressions en désillusions, de drames en révélations, Arthur va peu à peu plonger dans la folie à mesure que Gotham, elle, plonge dans la violence. Rongée par les inégalités, la pauvreté et les crimes, la ville semble sur le point de s'embraser... il ne manque qu'une étincelle pour que la poudrière explose. Et si un homme, laissé pour compte, bafoué par une société injuste et cruelle était cette étincelle ? S’il suffisait de lâcher la rampe, d'abandonner tout faux semblant pour enfin devenir celui que l'on est vraiment pour changer les choses... quitte à enflammer le monde ?

Certains diront que le film repose uniquement sur les épaules de Joaquin Phoenix, c'est faux mais pas tout à fait. Oui, tout ce que vous avez lu sur sa prestation est vrai, il est stratosphérique, monumental... les superlatifs manquent pour qualifier sa performance d’acteur tant celle-ci risque de vous hanter pendant un long moment une fois le film terminé. Personnage malade, de son physique décharné jusqu’à son esprit troublé, Arthur distille une sensation constante de malaise. Une sensation qui atteint des pics incroyables lors des passages où il est victime de ces fameux rires incontrôlés... un rire malade, un rire triste, un rire effrayant, un rire qui semble le déchirer de l'intérieur et lui faire extrêmement mal physiquement. La puissance évocatrice de certaines scènes est juste époustouflante. Pendant quelques instants, là, dans le confort du cinéma, nous ne sommes plus à l'aise. Les doigts enfoncés dans les accoudoirs, on assiste à quelque chose qui nous dérange, quelque chose qui nous dérange autant que les personnages du film quand ils sont face à Arthur. Un malaise palpable, une plongée crasseuse et voyeuriste dans la folie. Poussé par une fascination morbide, le spectateur assiste, impuissant, totalement KO dans son siège, à la lente descente aux enfers d'Arthur.

Un Arthur qui symbolise à lui seul tout un pan de la société. C'est un des laissés-pour-compte, un des indésirables. C'est un pauvre qui vit dans un appartement miteux avec sa mère malade. C'est un oublié du système, celui à qui on coupe des aides sociales parce que les privilégiés du dessus ont besoin de toujours plus d'argent et que pour eux, les gens comme Arthur ne comptent pas. Avant d'être un film de super héros ou plutôt de super vilain ici, Joker est aussi un drame social et sociétal. Un pavé dans la baie vitrée d'une Hollywood timorée, trop propre sur elle, fade, sans message. Une caméra braquée sur notre société dans ce qu'elle a de plus cruel et injuste. La Gotham du film, avec sa période eighties, fait pourtant étrangement écho à nos villes modernes ou la banalisation de la violence et des inégalités est telle que les gens ne s'en offusquent même plus et se contentent de regarder leurs écrans de télé ou de téléphone. "I killed those guys because they were awful. Everybody is awful these days. It’s enough to make anyone crazy". Cette phrase d'un Arthur en pleine transformation, plus vraiment lui-même mais pas encore totalement Joker, est on ne peut plus d'actualité.

That’s what you called me on the show, a joker. Do you remember?

Que certains se rassurent, Joker reste bien un film de l'univers DC et le lore "Batmanesque" est bel et bien présent mais le film est bien plus que ça. Porté par un Joaquin Phoenix méconnaissable, maladif, véritable sac d'os, Joker est une claque dans la gueule qui nous jette au sol et nous met face aux injustices, aux problèmes et aux contradictions de notre époque. Mais comment un personnage aussi rongé de l'intérieur pourrait-il être le Joker ? Hé bien tout simplement en faisant fi des règles établies afin de devenir lui-même. Passer de ces faux sourires forcés à de vrais, cesser de subir et redresser la tête, suivre sa voie quitte à ce que soit la mauvaise. A partir du moment où Arthur lâche totalement la rampe, suite à une série d'événements aussi tragiques que révoltants, la transformation commence. Insidieuse, lente, elle progresse tel un cancer, elle bouffe le personnage de l'intérieur et ressort sur son physique via le masque du clown. "I use to think that my life was a tragedy but now I realize, it's a comedy", "I just hope my death makes more sense than my life"... sans espoir, exclu d'une société qui ne veut pas le voir et qu'il dérange, Arthur devient un personnage flamboyant dans sa folie et sa quête de justice. A ce titre, les scènes de l'escalier sont les plus marquantes. On peut y voir Arthur monter des centaines de marches péniblement. L'escalier semble presque infini, presque aussi haut qu'un immeuble. On peut aussi y voir le Joker descendre ces mêmes marches, très rapidement, avec panache et en dansant. Méconnaissable dans son rôle d'Arthur, Joaquin Phoenix l'est tout autant dans celui du célèbre clown. Une incarnation aussi folle et dérangeante que parfaite du meilleur ennemi de Batman qui termine en apothéose tant le dernier tiers du film est absolument grandiose à tout point de vue.

La bande-son de Hildur Guðnadóttir joue d'ailleurs un rôle prépondérant dans tout ça avec ses sonorités crispantes, acides, perturbantes. Les scènes les plus malaisantes sont accompagnées par une musique qui les rend encore plus éprouvantes. Tandis que l'image nous choque, c’est comme si la musique rayait de la tôle à 2 cm de nos oreilles, obligeant presque le spectateur à serrer les dents ou à détourner le regard. Mais revenons à nos moutons, ou plutôt à nos chauves-souris. Oui Joker reste un film DC et donc dans un univers de super héros et à ce titre, il utilise celui de Batman et il le fait de manière parfaite. Thomas Wayne, Bruce ? Ils sont bien présents. Les répercussions entre les Wayne et les Fleck, sortes d'effets papillons dévastateurs, sont gérées de main de maître par Todd Phillips et suffisamment présentes pour que le film reste vraiment ancré dans les grandes lignes de l'histoire du chevalier noir. Gotham, triste, gangrénée par tant de maux, reste cette ville malade qui attend un sauveur providentiel qui osera changer l'ordre établi. Batman étant évidemment aux abonnés absents, la place est donc vacante…

All I have are negative thoughts...

Pour ressortir de l'aspect comics, Joker fait étrangement écho, notamment sur sa fin, à ce qu'il se passe dans diverses parties du monde actuellement. Était-ce volontaire ? Peu importe. Avec cette figure du clown qui, même en enfreignant la loi, a rendu une sorte de justice sauvage, a rendu les coups portés par des individus protégés par le système, le personnage devient un symbole, le masque du clown devient un signe de ralliement. Les masques de Guy Fawkes portés par les anonymous, les gilets jaunes arborés par les manifestants notamment français, les émeutes à Hong Kong... les parallèles à faire sont nombreux et terminent de faire de Joker, en plus d'être un film dans un univers super héroïque et un drame social, un film éminemment politique. Mais alors quid de la morale ? Le film glorifie-t-il la violence ? Non. Il propose juste une vision des choses, qu'elle plaise ou pas. Chacun pourra y voir ce qu'il veut. Certains y verront un film dangereux, pouvant inciter des individus perturbés à passer à l'acte, d'autres y verront un film coup de poing poussant à une révolte qui doit se faire sans concessions. D'autres encore y verront un décorticage éprouvant montrant comment notre société actuelle engendre ses propres monstres. Qui a tort ? Qui a raison ? Peut-être un peu tout le monde. A l'image du Joker, le film possède plusieurs facettes et ne peut pas être défini de manière simpliste.

On pourrait faire un autre parallèle avec notre société concernant la réception du film. Les critiques sont très divisées et certains qualifient la dernière réalisation de Todd Phillips de film dangereux et mauvais. Sur un site bien connu regroupant les reviews des différents médias parlant de cinéma, la moyenne du film noté par les critiques est de 5,8/10 là où celle des spectateurs est à plus de 9. On pourrait y voir une tentative de certains critiques de torpiller le film pour son aspect politique clairement en contradiction avec ceux qui gouvernent actuellement les plus grands pays, tels des journalistes de chaînes d'infos en continu relayant inlassablement les recommandations d'un gouvernement corrompu et indécent. Comme les manifestants qui veulent plus d'égalité et de justice, Joker serait dangereux ? "Regardez plutôt le dernier Avengers ! Il est marrant, fun et ne vous poussera clairement pas à faire quoi que ce soit". N'en déplaise à certains, Joker est un film qui est en partie le produit de son époque, ni plus, ni moins. Inutile de prendre les spectateurs pour des idiots, nous savons faire la part des choses. Même en étant en pétard contre le système, qui va demain enfiler un masque et mettre sa ville à feu et à sang ? Joker fait peur parce qu'il montre que le glissement vers la violence est simple, facile... du jour au lendemain, quelqu'un à bout peut craquer. Et alors ? Ce genre d'événements n'a pas attendu le film de Todd Phillips pour arriver. Combien de fusillades aux USA depuis le début de l'année ? Combien de bavures policières en France en 2019 ? Combien de prisonniers politiques à Hong Kong ? Combien d'émeutes un peu partout ? Plutôt qu'un fusible voué à faire disjoncter notre société via la violence, Joker est bien plus une photo, un cliché instantané à un instant T de notre monde. Si il provoque autant de réactions, c'est parce qu'il nous renvoie au visage certains aspects de notre quotidien qui sont tout sauf beaux à voir.

On a aimé

On n’a pas aimé

La prestation de Joaquin Phoenix, magistrale
L’ambiance générale fascinante
Un film alliant le fond et la forme
La bande-son incroyable
Film de super héros excellent et sombre
Mais également drame social et film politique
Une réalisation de haut vol
Le sentiment de malaise constant que dégage le film
Les scènes de rires
Le dernier tiers du film, hypnotique et glaçant qui débouche sur une fin en apothéose
Un film qui nous pousse à la réflexion sur bien des points
Brillante utilisation de l’univers de Batman
Certains spectateurs auront du mal à encaisser tout ça.



Bref, non pas un, mais deux verdicts !

L’avis perso de Damien / Damzema // You think this is funny? Is this a joke to you?
A l'heure du verdict, il est bien difficile de trouver une conclusion pour parler de Joker. Film de super héros, drame social, film politique ? Faut-il rayer une mention inutile ? Quelle morale en dégager ? Comme son protagoniste, Joker est clivant. Certains y verront un chef-d’œuvre dans l'air du temps, d'autres un film à la morale douteuse et trop malaisant. Personnellement, je trouve que Joker est un film aussi éprouvant que fantastique. Éprouvant quand il nous dépeint le mal être d'Arthur Fleck, la décrépitude ambiante de nos sociétés modernes que l'on refuse de voir et qui est pourtant une chose que nous lèguerons à nos enfants, éprouvant dans sa description de la folie et dans son autopsie d'un homme condamné à chuter. Mais il est aussi fantastique dans ce qu'il propose visuellement avec une réalisation impeccable, dans ce qu'il provoque chez le spectateur, dans sa manière de nous faire nous interroger sur nous mêmes et notre société. Et puis c'est excellent film tiré de comics et c'est assez rare pour être souligné. J'utilise rarement ce terme mais pour ce film, je vais m'y risquer. Joker est un chef-d'œuvre, un film coup de poing qui fera date et qui laisse le spectateur groggy une fois le générique terminé. Quelles conclusions tirer de tout ça ? Ce sera à chacun de se construire les siennes. En tout cas, entre un MCU omniprésent et aseptisé et un DC Universe en perdition totale depuis qu'il tente de singer Marvel, ce film à part, ce one shot qui se suffit à lui-même est une véritable bouffée d'air. La preuve qu'on peut encore faire des films sur les super héros (ou leurs adversaires) sombres, avec du fond et à contre-courant des recettes habituelles. La Warner a énormément déçu de fans, notamment avec sa tentative d'univers DC. Avec Joker, elle prouve que tout n'est pas perdu face au colossal Disney. Croisons les doigts pour que le prochain film Batman, réalisé par Matt Reeves et avec Robert Pattinson dans le rôle titre, soit aussi inspiré.



L’avis perso de Vincent / onizukadante // Vision artistique + acteur stratosphérique = chef-d’œuvre
Je voulais écrire mon avis perso puisque je suis également allé voir le film en VO mais Damzema m’a enlevé la plupart des mots de la bouche. Cette version de Joker est marquante, percutante et Joaquin Phoenix prouve une fois de plus qu’il est un acteur incroyable. Le film offre un Joker ancré dans une réalité très proche de la nôtre et c’est sûrement ce qui peut en effrayer certains. Il fait des références à bien d’autres versions du Joker, comme au moins trois plans que je jure être des références au Joker de Heath Ledger (dont une plus flagrante que les autres), comme une touche dans laquelle je suis persuadé d’avoir vu un écho à la version de Jack Nicholson. Il y a quelques autres easter eggs à mon sens mais je retournerai le voir avant de les lister, de peur que ma mémoire ne me joue des tours. Mais j’y vois aussi un Joker bien plus nuancé que celui d’Azzarello et Bermejo mais avec une idée identique, j’y vois un rire qui me rappelle le The Killing Joke de Moore, j’y vois L’Homme qui Rit, bref, j’y vois un véritable amour pour ce personnage qui au fil des histoires gagne en contraste. Todd Phillips y ajoute sa touche, montrant un être humain malmené, parfois affligeant mais tellement attachant… Attachant parce qu’il rappelle bien des personnes dans notre société, des gens qui sont au bas de l’échelle et qu’on essaie d’enfumer pendant que les plus aisés continuent à s’engraisser. Joker, c’est un film qui m’a profondément marqué, qui m’a subjugué par une mise en scène intelligente, par une histoire poignante et par une photographie de toute beauté. C’est un film moderne avec un véritable message, sans dénaturer l’univers dans lequel il est ancré. Comme Damien/Damzema, faute d’originalité, je me dois de souligner qu’il s’agit à mes yeux d’un véritable chef-d’œuvre, un film comme on n’en voit que trop rarement.

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